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Artisan orfèvre des mots Spécialisée en filigrane.

samedi 6 mai 2017

Point de vue : De la pauvreté et de l’orgueil


J’ai vu la pauvreté briser l’orgueil.
J’ai vu le mal, les traces profondes de blessures et de boucles de ceintures dessinées sur le corps de victimes. J’ai vu des larmes, des sillons creusés sur les joues de celles qui subissent tous les jours des humiliations. Elles se plaignent à demi-mot, chuchotent leur détresse par peur d’être entendues, d’être montrées du doigt. Elles savent qu’elles ont perdu leur fierté dans ce titanesque ring d’injustices humaines, et se raccrochent à ces derniers fragments de dignité. Elles ont entendu leurs mères, leurs sœurs, leurs tantes et cousines, leurs voisines et toutes leurs proches se faire cogner. Elles ne veulent pas en parler, juste soigner le mal et s’en aller loin.
Doit-on les juger pour autant ?
Doit-on les blâmer, les sacrifier sur l’autel de nos pensées grandiloquentes de justice humaine ?
Chaussées de misère, elles sont devenues serpillières, des torchons qui essuient tous les mauvais coups de leurs tortionnaires. Vêtues d’idées séculaires sur la prééminence des hommes, d’analphabétisme, et d’ignorance de leurs droits, elles acceptent avec fatalité tous les tourments. Qu’elles soient chez leurs époux ou chez leurs parents, les coups pleuvront sur elles…
L’acharnement dont elles sont victimes ne s’arrête pas là, il continue par la société bien pensante, à chaque fois que sort un article quelconque qui les décrit, ou un sondage… Bien sûr elles répondront en majorité trouver cela normal, mais ce sont des paroles en l’air, des mots qu'elles profèrent pour cacher, pour justifier, le mal dont elles sont victimes. Légitimer sa détresse est le premier réflexe humain.
Nous savons tous que c’est la pauvreté tant matérielle qu’intellectuelle qui les pousse à embrasser ces notions d’inégalité. Nous savons tous que c’est notre société toute en disparités, et en manque d’humanisme, qui en est responsable.
Posons-nous les vraies questions. Blâmer la victime au lieu de blâmer les bourreaux ne nous grandit pas !